LE PEUPLE D'ANGE
Chacune des oeuvres d’Ange-François Félix s’impose comme une évidence. Cycliste, cheval, poisson, valet, dinosaure, araignée, chacun de ces êtres émerge du chaos en majesté. Et pourtant ils sont tous le résultat de l’assemblage de pièces hétéroclites. Boulons, tenailles, tubes, ressorts, socs, lames, tous ces bouts de ferraille lourds de rouille viennent s’agglutiner et s’imbriquer pour faire éclore des formes harmonieuses et parfaites. Leurs airs naïfs apaisent le regard, la queue des poissons se fait lune, la lance du chevalier perce le ciel comme jamais.
C’est une chance qu’Ange-François Félix les ait jalousement gardées chez lui jusqu’à maintenant. Chez lui, chez eux. Ils ont eu le temps de vivre ensemble à Altagène. Ainsi sont-ils désormais une famille, un peuple. Le temps semble venu que chacun aille parcourir le monde. Chaque individu emportera l’existence de ses frères avec lui. Comme des Phenix ils renaissent, car Ange-François Félix a sorti de la terre ou de tas de rebuts chaque élément qui les compose. Comme des Phenix, ils iront briller ailleurs.
Ils s’inscrivent dans l’histoire de leur terre et la prolongent; ils s’inscrivent dans l’histoire de l’art, rappelant les constructions de Tinguely ou celle de Richard Stankiewicz dans les années 60. D’autres oeuvres, plus abstraites, s’imposent par leur force et leur pureté. Grandes plaques de fer patiné, elles jouent à cache-cache avec la lumière. Comme Soulage composant avec la matière du noir, Ange-François Félix joue avec la rugosité ou la brillance de la matière. Sa matière, le métal.
Christine Siméone